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Les mégabassines illégales seront détruites, assure l’État


| Reporterre | Bassines

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Selon le cabinet du ministre de l’Agriculture, les mégabassines illégales vont être détruites, même celles déjà en fonctionnement. Une annonce inédite alors que les recours contre ces retenues d’eau agricoles se multiplient.

« Les retenues de substitution illégales seront vidées et démontées. » Cette déclaration inédite a été faite par le cabinet de Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture, lors d’une conférence de presse sur la déclinaison du « plan Eau » au niveau agricole le 7 novembre.

Interrogé sur l’avenir des cinq mégabassines illégales de Charente-Maritime, le conseiller du ministre a été très clair. « Là où il y a des retenues illégales, elles seront démontées. Les décisions de justice seront respectées et l’État les fera appliquer. »

En février dernier, le Conseil d’État avait confirmé l’interdiction de remplir les cinq mégabassines des communes de Cram-Chaban, La Laigne et La Grève-sur-Mignon. En cause : des études d’impact sur les milieux défaillantes.

La fin d’une longue procédure judiciaire entamée par les opposants en 2008. À l’époque, l’association Nature Environnement 17 avait obtenu l’annulation de la première autorisation de construction de ces cinq mégabassines. Une deuxième demande d’autorisation déposée en 2015, avait également été annulée en 2018. Une décision confirmée en appel en 2022 puis par le Conseil d’État en février 2023.

Cinq ans d’exploitation illégales

Malgré tout, ces retenues d’eau dédiées à l’agriculture intensive avaient été construites et exploitées par l’association syndicale d’irrigation des Roches, regroupant treize agriculteurs. Et ceci au grand dam des opposants. « Cette déclaration est la bienvenue mais elle arrive cinq ans trop tard. Car cela fait cinq ans que ces réserves sont exploitées illégalement », résume à Reporterre Marie Bomare, chargée de mission juridique chez Nature Environnement 17, l’association qui a porté tous les recours en justice.

« L’État n’avait jamais eu une position aussi tranchée sur le sujet. Mais je pense qu’ils sont obligés de lâcher du lest. Je pense qu’ils n’ont pas le choix que de déclarer que toutes les décisions de justice doivent être respectées », estime l’eurodéputé écologiste Benoît Biteau, farouche opposant aux mégabassines.

« Que faire quand les décisions de justice ne sont pas respectées ? »

C’est pourtant loin d’être une évidence sur le terrain. Après la décision du Conseil d’État, le préfet de Charente-Maritime a demandé à l’association syndicale des Roches de régulariser cette situation et de redéposer une nouvelle demande d’autorisation. En somme, il s’agit d’essayer une nouvelle fois de régulariser a posteriori la construction de ces ouvrages agricoles tant décriés. « C’est une façon de leur laisser une troisième chance. Mais vu les dégâts que cela cause aux milieux naturels, ils ne pourront jamais obtenir l’autorisation environnementale à cause des espèces protégées », poursuit Marie Bomare.

Finie la « pratique du fait accompli » ?

Actuellement trois des cinq bassines sont en fonctionnement. Celle de la commune de La Laigne, fissurée et l’un des trois bassins de la commune Cram-Chaban ne sont pas exploités. Cette dernière avait été la cible des opposants lors d’une manifestation en novembre 2021. Les militants avaient mis le feu aux bâches en plastique qui assurent l’étanchéité de l’ouvrage et subtilisé l’une des pompes.

Ces dégradations avait provoqué la colère du syndicat agricole productiviste FNSEA qui avait porté plainte. L’eurodéputé écologiste Benoît Biteau, avait au contraire justifié ces actes de contestation « Quand on a des équipements dans l’illégalité la plus complète, quand les décisions de justice ne sont pas respectées, quand l’État ne fait rien, on a quoi comme autre solution pour se faire entendre ? », avait-il déclaré à Reporterre.

Si le ministère de l’Agriculture tenait parole et ordonnait la destruction des cinq bassines de Charente Maritime, cela créerait un précédent politique et juridique. « Cela montrerait que la pratique du fait accompli n’est pas gagnante devant le juge. Ensuite, cela ferait une jurisprudence pour les autre porteurs de projets qui voudraient construire avant que les tous recours juridiques soient tous épuisés », espère Marie Bomare. De quoi donner de l’espoir aux opposants qui se battent contre ces projets de bassines très contestés depuis des années.