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« Les mégabassines du Poitou sont au point mort, révèle un document interne »


Lettre d'information Coopérative de l'Eau 79 N°4

| Reporterre | Bassines


Une lettre d’information transmise le 25 août 2025 aux agriculteurs par la Coopérative de l’eau 79, maître d’œuvre du projet des mégabassines dans les Deux-Sèvres, la Vienne et la Charente-Maritime, révèle un projet en situation critique, voire potentiellement au point mort
Selon cette lettre, la plus grande mégabassine construite est inutilisable, les chantiers sont interrompus par manque de financement, et des négociations politiques sont en suspens, ce qui suscite des doutes quant à la viabilité du projet.

Situation de la mégabassine de Sainte-Soline

Il s'agit de la plus importante retenue mise en chantier jusqu’à présent, et également le site principal des mobilisations anti-bassines depuis la manifestation de mars 2023

Cette bassine a vu son autorisation environnementale annulée par la cour administrative d’appel de Bordeaux. En conséquence, un remplissage est impossible tant qu'une dérogation relative aux espèces protégées (notamment l’outarde canepetière) n’est pas obtenue
Reporterre
La Coop envisage de déposer cette demande de dérogation en 2026, sans préciser de date exacte Or, sans cette dérogation, le remplissage n’est pas autorisé, ce qui signifie que la bassine restera à sec durant la saison d’irrigation, privant ainsi les onze agriculteurs qui y sont raccordés de ressource essentielle

Marie Bomare, juriste à Nature Environnement 17, souligne qu’en raison du statut critique de l’outarde canepetière, il ne suffira pas de soumettre un simple formulaire administratif, mais plutôt des études sérieuses et des mesures de compensation pour répondre aux exigences environnementales

Implications générales du projet

Le projet se trouve frappé de multiples difficultés : judiciaires, environnementales, financières et politiques. Tous ces éléments cumulés placent son avenir en grande incertitude

L'article met en lumière les contradictions entre l’ambition agricole du projet et ses contraintes réglementaires et écologiques, en soulignant la fragilité de sa mise en œuvre.

Conclusion

L’article de Reporterre révèle un projet de mégabassines désormais en situation critique, où les ambitions d’irrigation susceptible d’appuyer l’agriculture se heurtent à des contraintes juridiques, écologiques, financières et politiques. La bassine de Sainte-Soline, point focal du dossier, illustre ce conflit systémique, où les exigences de protection de l’outarde canepetière font obstacle à l’appropriation de cette ressource en eau.

Coût total et financement public

Le projet initial des seize mégabassines dans les Deux-Sèvres est estimé à 76 millions d'euros, soit 20 millions de plus que l’estimation de 2019 (55 M€)

En moyenne, chaque mégabassine représenterait un coût d’environ 4 millions d’euros, ce qui, multiplié, pourrait correspondre à un financement public total estimé à au moins 840 millions d’euros pour l’ensemble des projets en France (selon un décompte associatif de 300 bassines)

À l’échelle locale, pour la Vienne par exemple, la première phase de construction de onze bassines est estimée à 22,3 millions d’euros, dont 14,9 millions financés par des fonds publics
Basta!

Ces financements proviennent majoritairement d’acteurs publics comme les Agences de l’eau (environ 50 %) et d’autres fonds de l’État (20 %), soit environ 70 % d’argent public

Modèle économique local et crise de financement

La Coopérative de l’eau 79, pilote dans les Deux-Sèvres, traverse une crise aiguë : augmentation des coûts, adhérents en baisse, aides publiques gelées, et perspectives financières fragiles

Après la suspension des autorisations environnementales (notamment pour Sainte-Soline), l’Agence de l’eau Loire-Bretagne a interrompu le paiement du solde des aides. 90 % de l’aide prévue a déjà été versée, mais les 10 % restants sont suspendus en l’attente d’une décision favorable

Les coûts de fonctionnement — notamment le pompage de l’eau — sont élevés du fait de la consommation électrique, ce qui rend le prix de l’eau stockée nettement plus cher que le stockage naturel (zones humides)

Coût supporté par les agriculteurs adhérents

Les exploitants agricoles membres de la Coop sont mis à contribution pour couvrir les coûts restants. Ceux qui n’utilisent pas l’eau des bassines voient malgré tout leurs factures augmenter.

Sur certaines exploitations, les frais d’adhésion ou de consommation ont atteint 4 000 à 4 500 € par an, ce qui devient économiquement insupportable. Certains agriculteurs ont même renoncé à irriguer ou quitté la coopérative
Les conséquences financières s’étendent à la Coop elle-même : son capital social a fondu (perte d’environ 5 000 €), aggravé par le départ de certains irrigants sans reprise de parts, ce qui fragilise les volumes d’eau facturables (jusqu’à 1,5 million de m³ perdus, soit 10 % du budget eau)
D’autres coûts indirects pèsent fortement : sécurisation des sites (barrières, caméras, etc.) a coûté près de 366 000 € rien que pour la bassine d’Épanne. Y s’ajoutent les pertes irrécouvrables (30 000 €) et les créances douteuses (145 000 €)
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