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Moratoire sur les méga-bassines : militants et irrigants ont les yeux tournés vers l’Assemblée


La bassine de Mauzé-sur-le-Mignon est l’une des trois à avoir vu le jour dans le bassin de la Sèvre niortaise et du Mignon depuis la signature du protocole d’accord en 2018

| Ouest France | Bassines

Faciliter et accélérer le stockage de l’eau ou donner un coup de frein en actant un moratoire de dix ans sur les projets de bassines en France, en cette dernière semaine de mai, les députés vont devoir trancher.

En ces derniers jours de mai, les méga-bassines vont-elles avoir « Duplomb » dans l’aile par le vote des députés ? C’est tout l’espoir des opposants au stockage de l’eau à des fins agricoles qui comptent sur l’Assemblée nationale pour acter le principe d’un moratoire de dix ans sur le déploiement des réserves à l’échelle nationale. Alors que Clémence Guetté, la députée (LFI) originaire des Deux-Sèvres, avait vu sa proposition de loi être retoquée dans l’hémicycle en novembre 2023, un nouvel amendement a, cette fois-ci, été adopté en commission parlementaire du développement durable et de l’aménagement du territoire le 6 mai dernier dans le cadre de l’examen de la proposition de loi dite « Duplomb » visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur.
 
Il sera l’un des enjeux forts de la semaine parlementaire clivante qui va s’ouvrir, ce lundi après-midi 26 mai, sur fond de lobbying agricole de la FNSEA et des Jeunes agriculteurs dont les tracteurs ont pris position devant le Palais Bourbon. Ambiance.

« Poser les bases d’un cadre apaisé »

Ce moment politique est déterminant à plusieurs titres. En effet, s’il est confirmé […], il permettrait une remise à plat indispensable sur la gestion de l’eau en France et poserait les bases d’un cadre apaisé pour en débattre collectivement à l’heure où le changement climatique, la raréfaction de la ressource et les conflits d’usage s’intensifient, estime « Bassines non merci ! » qui porte la contestation depuis plus de huit ans maintenant dans les Deux-Sèvres et le démarrage de l’enquête publique dans le bassin de la Sèvre niortaise et du Mignon.
Depuis trois semaines, le collectif a entrepris une campagne d’interpellation des élus avec le relais de citoyens et d’associations dans le but de faire pencher la balance de son côté. Elle vise à mettre en évidence les multiples enjeux soulevés par ces projets, tant sur le plan agricole, qu’environnemental et démocratique, et d’interpeller les responsables politiques sur la nécessité de repenser notre rapport à l’eau et à l’agriculture, défendent les militants conscients que leurs chances de victoire restent mesurées même si elles font trembler la Coopérative de l’eau qui fédère les irrigants.

« Ce serait la mort de l’agriculture »

Paris, c’est loin mais on suit de très près ce qui va être voté car dans un sens ou dans l’autre, l’impact va être très fort sur notre quotidien, réagit François Pétorin qui, il y a quelques jours, a commencé à puiser dans la réserve de Priaires à laquelle il est raccordé pour ses semences de betteraves. Je ne conçois pas que cet amendement puisse passer. Si le moratoire devait être validé, ce serait la mort de l’agriculture sur notre territoire. On n’aurait aucune visibilité. On a besoin de sécuriser l’accès aux nappes pour nos fermes. Il ne faut pas stopper les retenues mais au contraire, les multiplier, défend l’exploitant en colère contre les élus qui soutiendraient cette proposition.
 
En attendant le verdict, la Coopérative de l’eau continue de peaufiner son dossier afin d’obtenir la fameuse dérogation espèces protégées liée à la présence de l’outarde canepetière et réclamée par la Cour administrative d’appel de Bordeaux qui, le 18 décembre 2024, a déclaré illégaux en l’état la méga-bassine de Sainte-Soline ainsi que trois autres chantiers à venir. La demande devrait être formulée auprès de la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) au début de l’automne. Elle devra être entérinée par un arrêté préfectoral. Il ne faut pas perdre de temps. Il faut que la réserve soit opérationnelle au printemps 2026. A moins que les députés n’en décident autrement.

« Un combat idéologique »

La semaine qui s’ouvre s’annonce cruciale, appuie Delphine Batho, la députée (Génération écologie) des Deux-Sèvres, qui a préféré rester à Paris tout le week-end pour préparer la bataille, pied à pied, alinéa par alinéa face au gouvernement. Nous sommes face à un festival de mesures obscurantistes d’inspiration trumpiste, s’alarme l’ex-ministre de l’Environnement qui s’inquiète de la remise en cause de l’Anses, de la réintroduction de l’acétaprimide (interdit depuis 2018) et de la redéfinition des zones humides qui restent la maternité de la biodiversité. C’est un combat idéologique qui va bien au-delà du moratoire sur les bassines, insiste celle qui, dans ce domaine, plaide pour un arrêt des travaux des ouvrages de stockage et entend régler la problématique des réserves construites illégalement comme celles de Charente-Maritime » .