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Agriculture, industrie, nucléaire : qui sont les gros consommateurs d'eau en France ?


| Les Échos | Documentation

La note de France Stratégie

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France Stratégie a publié ce jeudi une note sur les usages de l'eau en France, comportant des données régionales et une estimation inédite de la consommation liée à l'évaporation dans les retenues d'eau artificielles. De quoi alimenter le débat sur le partage de cette ressource appelée à devenir rare.

Les pluies abondantes de l'hiver et de ce début de printemps, qui ont ramené les nappes phréatiques à un niveau « globalement satisfaisant » selon le dernier pointage du BRGM, éloignent le spectre d'une sécheresse estivale cette année.

La question du partage de l'eau reste néanmoins cruciale, alors que le réchauffement climatique va continuer à raréfier les ressources hydriques dans les années à venir. Celles-ci ont déjà reculé de 14 % au cours des quinze dernières années, rappelle une note de France Stratégie publiée ce jeudi, qui fait le point sur les usages de l'eau dans l'Hexagone.

Travail de prospective

Un travail bienvenu, alors que les chiffres font polémique dès que des tensions sur l'eau apparaissent. Qui, de l'agriculture ou des centrales nucléaires, consomme le plus ? Cette note constitue la première étape d'un travail de prospective sur les usages de l'eau à l'horizon 2050, que le centre de réflexion rattaché à Matignon doit remettre au Premier ministre à l'automne prochain.

Pour y voir clair, il faut distinguer prélèvements et consommation. Les prélèvements sont des « volumes d'eau extraits définitivement ou temporairement » de la nature, rappelle France Stratégie. Une partie de ces volumes y retourne après utilisation : c'est le cas de l'eau utilisée dans les canaux ou pour refroidir les centrales nucléaires, par exemple. Non sans impact, rappellent aussi les auteurs de l'étude : les eaux restituées peuvent être polluées ou réchauffées, et leur rejet peut intervenir avec un décalage de temps (neiges artificielles) ou à un autre endroit.

Selon la note, les prélèvements d'eau en France sont relativement stables dans le temps : 31 milliards de mètres cubes en moyenne sur la période 2012-2019, 30,2 milliards en 2020. Une petite moitié (47 %) est prélevée par le secteur énergétique et 18 % par les canaux, tandis que l'eau potable représente 14 % et l'agriculture 11 %.


Nouveauté de ce rapport, il intègre des données locales, par bassins-versants : celui de Rhône-Méditerranée absorbe 80 % des prélèvements de l'énergie, tandis que 87 % ceux de l'agriculture sont concentrés sur trois d'entre eux (sur sept) : Rhône-Méditerranée, Loire-Bretagne, et Adour-Garonne.

Augmentation de l'irrigation

Comme les centrales nucléaires et les canaux restituent une grande majorité de l'eau prélevée, la répartition de la consommation est très différente. L'agriculture arrive de loin au premier rang, avec près des deux tiers de l'eau consommée (62 %). France Stratégie précise la provenance de l'eau utilisée pour l'irrigation : 58 % viennent des eaux de surface et 42 % des nappes phréatiques. Ainsi que sa destination : 34 % des surfaces irriguées sont consacrées à des produits exportés et, dans le solde, 28 % à des aliments pour animaux et 26 % à de la nourriture pour l'homme.

Le rapport confirme aussi que les surfaces irriguées progressent sur tout le territoire (+23 % entre 2010 et 2020), particulièrement dans le nord de la France où les pluies sont de moins en moins efficaces. La hausse y est essentiellement liée à la culture des pommes de terre et des légumes d'industrie, comme les petits pois et les haricots verts.

Toute l'eau prélevée dans la nature pour l'agriculture n'est pas considérée comme « consommée ». Une partie de l'irrigation par aspersion, qui représente 87 % des surfaces irriguées, retourne à la nature après ruissellement : France Stratégie l'estime à 10 % de l'eau utilisée. Autre conclusion, la consommation d'eau est concentrée à 60 % entre juin et septembre, en raison de l'irrigation.

Enfin, les auteurs de la note ont tenté d'évaluer l'impact des stockages d'eau sur la ressource. Estimant à 670.000 le nombre de retenues et réserves artificielles, ils considèrent qu'elles engendrent une évaporation supplémentaire « de l'ordre de 1 milliard de mètres cubes par an », non comptabilisée aujourd'hui dans les statistiques officielles.