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À Banthelu, la fronde contre la mégabassine illégale prend de l’ampleur


| Le Parisien | Vexin

La bassine illégale a fait tripler la population de Banthelu. Ils étaient autour de 300 opposants à se rassembler ce samedi après-midi dans le petit village du Vexin pour protester contre la réalisation de la première bassine agricole d’Île-de-France. La plupart ont manifesté jusqu’au pied de ce bassin long de 125 m et large de 50 m, qui surplombe de 2 m le chemin qui le borde, au bas du village. Il est vide et laisse apparaître ses bâches de plastique.

Cet équipement, qui peut stocker 25 000 m3 d’eau, a été réalisé en catimini pendant l’été par l’agriculteur, sans autorisation. La préfecture du Val-d’Oise a confirmé mardi l’irrégularité de la réalisation, dénuée de permis de construire et située en partie sur une zone non constructible et assuré que le site sera réparé. Les services de l’État avaient accordé à l’exploitant agricole l’autorisation de forage pour arroser les cultures, un forage qui devait sans doute alimenter la bassine.

L’arbre qui cache la « forêt de forages »

« L’eau est un bien commun » : la banderole en tête de cortège résume la mobilisation du jour. Bernard Loup, président de Val-d’Oise environnement, une des cinq associations qui ont déposé un recours devant le tribunal administratif, a salué la décision de la préfecture : « C’est bien, mais il va falloir qu’elle se réalise », estime-t-il dans la salle municipale ou les participants se sont réunis avant de marcher jusqu’au site. « Il faut aussi que le préfet organise une concertation sur la ressource en eau. La bassine cache une forêt de forages qui ne se voient pas. Il y en a de plus en plus, réalisés par des exploitants agricoles. Il est temps d’avoir une agriculture qui impacte moins les ressources en eau. »

« Si on ne s’était pas mobilisés, il pouvait y avoir d’autres bassines dans le Val-d’Oise », prolonge Aurélien Taché, député écologiste, à l’origine de la mobilisation après avoir été averti par des habitants qui ont découvert le bassin au retour de vacances. « Le préfet n’a pas répondu sur le fond, sur la question des forages de la nappe phréatique. Il faut qu’il y ait un vrai débat public et démocratique. »


« À tous les niveaux cette bassine est un projet néfaste », a souligné Gaspard Manesse, de la confédération paysanne. « Elle ne recueille pas d’eau de pluie mais de l’eau du forage qui s’évapore. C’est du gâchis. Les bassines assèchent les cours d’eau, détériorent les sols. C’est, à Banthelu, 25 000 m3 de terre arable qui ont été détruites », ajoute-t-il, élargissant le débat à la nécessité d’une agriculture non industrielle.

Le propriétaire du site, Olivier Hue, céréalier à la retraite qui vient de transmettre son exploitation à son neveu, a fait face à la salle hostile, avec courage, demandant « de ne pas stigmatiser l’agriculture », soulignant le nombre en baisse d’exploitants agricoles. « Un agriculteur vit avec l’eau. Sa première démarche le matin, c’est de regarder le pluviomètre. Sans eau, il n’y a pas d’agriculture. Nous sommes à l’écoute de vos propositions. Mais il faut qu’elles soient réalisables. »

L’étonnant silence des élus locaux

La salle respecte son intervention, mais s’étonne de l’absence du maire de Banthelu, du silence du conseil départemental du Val-d’Oise et du parc naturel régional du Vexin dont Banthelu fait partie. « Nous ne sommes pas des écoterroristes ! Nous ne déchirerons pas la bâche. C’est l’exploitant qui le fera… » a lancé Bernard Loup. De fait, personne n’a franchi le champ qui séparait le chemin de la bassine pour la démonter.

« La question de l’eau est déjà primordiale, cruciale, dans certains pays. Je travaille avec le Niger. Et elle va le devenir chez nous. Ce bassin porte atteinte à un bien commun », estime Gérard, venu de Saint-Gratien, qui met en cause le travail de la préfecture. « Nous sommes déjà confrontés à un méthaniseur au Perchay, ajoute Patrick. Cela commence à faire beaucoup. »